Article n°4 - Lisa

oct. 2025

Je suis née en 1993 en banlieue parisienne. Enfant sage, timide, clichée de la petite fille asiatique à lunettes première de la classe, je me concentre sur mes devoirs et les attentes de mon père : que je devienne ingénieure.

Il décède quand j’ai 16 ans, en 2009. Je passe mon bac, puis je commence une école préparatoire aux Grandes écoles à Paris. Le stress me tétanise, je ne répondrai pas aux attentes de mon père, j’échoue mon année. Je ne sais ni ce que je dois faire ni ce que je veux faire, j’envisage des nouveaux chemins. Je décline mon admission à l’école d’art Estienne à Paris et je poursuis une voie que je crois mieux connaître : les sciences.

 

Sans certitude sur mon avenir professionnel j’enchaine une licence en physique, en médiation scientifique et un master en sociologie. En parallèle je me perds dans des mauvaises relations, ma confiance en moi s’efface. Besoin de changement. Je quitte la banlieue parisienne pour les montagnes grenobloises.

J’enchaine des expériences de vendeuse, plieuse de linge, guide de visite artistique, secrétaire et comptable. Jusqu’à ce que mon corps m’impose une longue réflexion sur mes besoins, mes désirs et plus largement mon identité. Alors c’est seulement à 30 ans que j’assume mon vrai désir de peindre.

 

En 2023 je cherche encore mon identité, je choisis un pseudonyme : Koré Kisa.

Koré est un mot qui désigne des statuts grecques de femmes debout, symbole de féminité et de force. Kisa est une contraction de mon prénom et nom de famille.  

A l’acrylique je commence à peindre des représentations de nombres particuliers, notamment Pi et le nombre d’or, je crée des codes d’écriture qui représentent des valeurs numériques.

Je peins des formes géométriques et minimalistes sur des fonds abstraits. Je m’inspire d’éléments visuels et symboliques du jeu de Go (jeu de stratégie de territoires originaire de Chine) dont j’admire l’esthétique épurée et la philosophie. En parallèle je m’inspire de l’esthétique des écritures mathématiques, avec des éclaboussures qui évoquent l’infinité de l’espace.

 

La création implique des choix qui m’exercent à la liberté, je cherche l’imperfection comme une rébellion. Je découpe des espaces symboles de repères remis en questions, ceux qui nous guident ou nous limitent. Mes premières compositions reflètent mon émancipation d’un cadre stricte hérité.

Entre l’ordre et le désordre j’explore mes propres libertés.

J’aime lier les sciences, la philosophie et la psychologie avec des sujets comme le temps, la transmission, l’héritage, la quête de compréhension, ou encore le jeu. Je m’amuse à ouvrir des espaces d’émotion et de réflexion. 

  

A l’avenir j’aimerais beaucoup travailler avec des scientifiques pour produire des toiles en rapport avec leurs sujets d’études, ou encore sur des données statistiques pour vulgariser divers sujets scientifiques voire politiques. 

En parallèle, comme sur une deuxième ligne, je cherche de m’extraire du rapport aux nombres pour peindre de manière plus instinctive. J’apprécie mes gestes spontanés, moins calculés, presque naïfs, qui n’ont pas plus de sens qu’une apparence poétique.

  

Aujourd’hui, 2025, je décide de porter mon nom en tant qu’artiste.

Parce que je me sens enfin moi-même.

- Lisa Pak

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